Petit lexique des expressions courantes se rapportant à la seconde guerre modiale

Holocauste. Shoah. Judéocide. Génocide. Unicité. Spécificité. Témoins. Survivants. Rescapés. Victimes. Martyrs. Déportés politiques. Camps. Crimes contre l'humanité. Les Malgré-nous

Holocauste : ce mot désigne, dans l'Ancien testament, un sacrifice au cours duquel un animal est sacrifié puis brûlé. Utilisé pour désigner le massacre des Juifs entre 1942 et 1945, dans les camps d'extermination ou lors des operations des Einsatzkommandos, ce mot est un contresens: il n'y a pas de sacrifices humains dans la Bible (hormis celui du fils d'Abraham, interrompu par Dieu). Le mot Holocaust (ici en anglais) est cependant généralement utilisé dans le sens de "massacre de Juifs entre 1942 et 1945" par les Anglo-saxons. En effet, la lecture de la Bible et en particulier de l'Ancien Testament est très repandue chez les protestants américains. Le principal musée aux USA se nomme du reste US. Holocaust Memorial Museum. Ce mot, dont l'origine est finalement peu connue des ethnies catholiques romaines (ne lisant pas l'Ancien Testament), n'a d'impact émotionnel que sur les persomnes au courant du sens nouveau qui lui est attribué. Une source d'impact a été la (très discutable) série américaine "Holocaust" projetée sur les écrans européens, il y a une vingtaine d'année. C'est un mot à connotations religieuses, donc, généralement, assez faibles.

Shoah : est un mot hébreux signifiant "accident, catastrophe". Si les victimes, au moment de leur mort, ont réalisé ce qui allait leur arriver, on peut imaginer qu'ils ont pu le ressentir comme une catastrophe quasiment inattendue. L'expression idiomatique americaine décrivant un accident brutal est "comme une tonne de briques". Le mot Shoah nous semble également inexact en ce sens que la notion d' "accident ou catastrophe" implique un caractere fortuit, or, le massacre des Juifs entre 1942 et 1945, est tout, sauf fortuit, que l'on adopte la version volontariste (massacre voulu de longue date) ou la version circonstancielle (massacre survenu parce que des conditions politiques ou techniques étaient remplies). Le mot Shoah, du fait de son origine hébraique, est évidemment populaire dans les milieux juifs, de même qu'il l'est dans les milieux non juifs suite à l'influence du film de Lanzmann portant ce titre. De toutes façons, c'est un mot à très forte connotation émotionnelle mais principalement pour les Juifs.

Judéocide : mot savant signifiant littéralement "le fait de tuer des Juifs". Comme tel, il est compris de tous. Cest un mot à très forte connotation émotionnelle, quelles que soient les ethnies.

Génocide : est un mot savant de création récente (ca. 1946) signifiant littéralement "le fait de tuer des gens". Ces massacres sont des crimes contre l'humanité commis pour des raisons pseudo-ethniques (cas des Tziganes), eugéniques (opération T4), politiques (cas des Commissaires soviétiques), stratégiques (cas des Arméniens), religieuses (cas des Témoins de Jehovah), racistes (cas des Juifs), xénophobes ou morale (cas des homosexuels) etc., sur toute une ethnie. Bien entendu le génocide commence quand on tue UNE persomne pour une des ces (mauvaises) raisons. En terme mathématique on pourra dire qu'un génocide est un segment infini ayant ume origine de valeur égale à UN. Ce mot s'applique donc a tous les massacres effectués avant 1942 et après 1945, que ce soit sur des Juifs ou sur des nonjuifs. On parlera donc du Génocide des Armeniens (1916), comme des génocides des Babutu ou des Watutsi (1941). En tant que mot "savant" sa connotation émotionnelle est assez faible, d'autant plus que, mal utilisé, il prête à confusion. Le génocide nazi est le génocide commis par les Nazis, le génocide des Tziganes, des Juifs ou des Slaves est celui commis sur les Tziganes, les Juifs ou les Slaves. C'est cependant le mot que les H.dM. préfère utiliser.

Unicité : Autrement dit s'agit-il d'un cas unique, d'un événement qui ne s'est produit qu'une seule fois dans le temps ? Évidemment NON.

Spécificité : Il y a évidemment une spécificité à un génocide et particulièrernent à celui du peuple juif.

Témoins : Est temoin celui qui, sans y être concerné personnellement, a vu, entendu, senti certains événements liés à un génocide, que ce soit au prologue, au noeud ou au dénouement de celui-ci. Ont été, par exemple, témoins certains polonais ayant temoigné dans le film Shoah. Le président des H.d.M. est un témoin mineur car ayant vu l'exode des refugiés allemand et autrichien, accessoirement juifs, en 1938 et 1939, ayant cohabité avec des juifs cachés par ses parents entre 1940 et 1943, ayant enfin participé au rapatriement des Survivants en 1945.

Survivants : On donne le nom de Survivants aux Déportés (de quelque nature que ce soit) ayant été libérés par les Alliés en '44 et '45. Avant d'être des Survivants, ils étaient, suivant la dénomination allemande, des Haftlingen (littéralement des "gens qui ont été arrêtés", des prisonniers donc.

Rescapés : On domne le nom des Rescapés à toutes les personnes susceptibles d'être arrêtées et qui ont par ex., été cachées, qui se sont évadées ou ont été. libérées pour une raison ou une autre.

Victimes : Tous ceux qui pour une raison ou une autre ont été assassinés, en danger de l'être ou ont fait l'objet de mesures coercitives. On rangera parmi les victimes la centaine de milliers d'invalides, de déficients mentaux ou physique, etc., ayant été assassinés sous la dénomination inexacte d'euthanasie mais pour des motifs d'eugénisme. Il s'agit de l'Opération T4. Dans la France de Vichy, une quarantaine de milliers de malades mentaux a été 1nené à une mort lente par des diètes bien étudiées.

Martyrs : ce mot d'origine grecque signifie "témoin". Au cours du temps, les personnes sommées d'adjurer leur foi, qui refusent et étaient mises à mort ou torturées, étaient nommées "martyres" car ayant ainsi témoigné de leur croyance. Par 1a suite la dérive de sens a fait qu'il signifie de nos jours le combattant qui a donné sa vie pour une cause.

Déportés politiques : Strictement parlant, TOUS les déportés, qu'ils aient été Résistants des différents horizons sociaux ou politiques, Otages, Homosexuels, Tziganes, Témoins de Jéhovah, Juifs et j'en passe, TOUS l'ont été pour un ou des motifs issus de la politique nazie.

Camps : Il a existé, dans le IIIème Reich, entre 1933 et 1945, plusieurs sortes de camps, les prisons conventionnelles et les camps de prisonniers de guerre non compris. Dés la montée du nazisme et autour de l'époque de la prise de pouvoir (30/1/1933), les S.A puis les SS ont improvisé des lieux de détentions (les camps sauvages). Dés la prise de pouvoir, ceux-ci furent, sinon supprimés, du moins transformés en camps de concentration et camps de rééducation. A partir de cette époque, ils passent sous la juridiction de la SS. À partir de la déclaration de guerre (3/10/1939), les Nazis ayant 1es mains libres, commencent les massacres systématiques. Pour pouvoir organiser la déportation massive, les Nazis créent un peu partout en Europe occupée des camps de transit (Malines, Westerbork, Drancy, Pithivier, Compiègnes, etc.). Accessoirement, la France de Vichy avait déjà dès avant septembre 1939 ouvert des camps d'internement (Gurs, St Cyprien, Argelès, Les Milles, Rivesaltes, etc.). Certains camps de concentration nazis deviennent, en plus, des camps d'extermination (Maidanek, Auschwitz-Birkenau). Avec la conférence de Wannsee (janvier 1942) apparait la Solution finale du problème juif (Endl~sung des Judenfrage [q.v.] ). Un certain nombre de camps d'extermination spécialisés (Sobibor, Chelmno, Treblinka, Belzec, etc.) sont créés en Pologne. La plupart des camps de concentration, mais aussi ceux de prisonniers de guerre ou de travailleurs du STO (q.v.) sont des centres (Stammlager) dont dépendent des sortes de sous-camps ou Kommando de travail qui totaliseront finalement plusieurs dizaines de milliers. Hors de l¹organisation et de la juridiction de la SS, la Gestapo (q.v.) aura ses propres camps ou Auffangstlagcr (Fort de Breendonck, Fort de Huy).

Crimes contre l'humanité : opposés à Crimes de guerre ou Crimes contre la Paix: ces trois mots ont été définis plus précisément lors du Procés de Nuremberg (1er octobre 1946- 1947) intentés contre 22 ex-dirigeants et 10 associations nazis. Il existe un certain flou juridique en ce sens que la défition du crime de guerre est ancienne, même si on ne la fait remonter qu'à la fin du XIXème/début du XXème siècle. (Conventions de La Haye puis de Genève). Par contre les 2 autres crimes ont été définis très tardivement et en fait ont été appliqués avec effets rétroactifs. Les qualifications qui ont été appliquées aux faits reprochés aux accusés (personnes physiques ou morales), l'ont été dans une sorte d'analyse combinatoire:

On évitera de confondre ces 3 notions. Parmi les 10 associations nazies condamnées, on notera la SS.

SS : Initialement, dans les années de la montée du nazisme, la SS est née d'une spécialisation d'une milice dite S.A. (Sturm Abteihng = Section assaut). Le besoin s'est fait sentir de créer (9/11/1925) une garde rapprochée (on dirait de nos jours des Gorilles) pour A. Hitler. Cette petite unité a pris le nom de S.S. (Schutzstaffel = Unité de protection). Par la suite l'influence de la SS va supplanter celle de la S.A.. Voir la Nuit des longs couteaux. Vont ainsi apparaître des «spécialisations«: A côté de l'Allgemeine-SS (ensemble purement politique), la Totenkoppfverband sera l'unité chargée de la surveillance des camps et enfin apparaîtra, assez tard, la Waffen-SS, qui constituera finalement une puissante armée, à côté de -et en concurrence avec- la Wehrmacht (ou Armée allemande). La Waffen-SS seta constituée comme un corps d'élite, au même titre que, dans d'autres armées, les parachutistes ou les Commandos. Initialement, I'accès à la Waffen-SS se fera suivant un recrutement politique et physique trés sévère. Par la suite, et avec la formation d'unités ou légions non-allemandes (SS-Wallonie; SS-Langemarck; SS-Viking; SS-Charlemagne, etc.) les conditions de recrutement seront allégées et, du volontariat, on passera à l'incorporation pure et simple. C'est ainsi que des «Malgré-nous« (q.v.) alsaciens devenus SS seront, bien malgré eux, mêlés au massacre d'Oradour sur Glane en juin 1944... Comment apprécier la Waffen-SS ? Si le simple SS-man allemand (= soldat) n'est motivé que dans la mesure où il est passé et a été conditionné par le H.J (Hitlerjugend = Jeunesse hitlériemne) et le R.AD. (Reich Arboit Dienst = Service du Travail), il n'en est pas de même pour les cadres qui, à côté d'une formation militaire classique mais poussée, ont aussi subi un forte endoctriment politique. De toutes façons, comme pour toutes les unités d'élite, il y a et continuera d'exister un très fort esprit de corps. Dans l'échelle des peines à infliger à cette organisation (et non sur ses membres qui sont à culpabilité personnelles variables, on mettra au sommet, la Totenkoppfverband.

Les Malgré-nous : ce nom désigne les incorporés de force dans la Wermacht, la Kriegmarine, la Waffen-SS et, plus rarement, dans la Luftwaffe. (Respectivement l'armée de terre, la marine et l'aviation militaire allemande). Ont été soumis à cette incorporation plusieurs centaines de milliers d'Alsaciens, de Lorrains et de Belges des Cantons dits rédimés (Eupen - Malmédy). Ces trois régions avaient en effet été administrativement rattachées au Grand Reich, même si on ne peut pas, juridiquement parlant, dire qu'il s'agissait d'une vraie annexion. Pour éviter de constituer des unités à majorités alsaciennes, lorraines ou belges, les incorporés étaient dispersés dans des unités purement allemandes. Les unités de la Waffen-SS ayant été principalement engagées sur le front soviétique, elles y ont subis des pertes considérables. Les traitements infligés aux prisonniers par les Soviétiques a été une forte dissuasion contre la désertion. Le camp de prisonniers de Tambow est un exemple célèbre, toujours présent dans la mémoire alsacienne.


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Frederic Dupont
Mis à jour le : 8 mars 1998, 13h40 EST